Motos en Ukraine


Posons tout d'abord le décor : Radekhiv est une ville d'environ 10 000 habitants, à l'ouest de l'Ukraine. La majorité des ménages ne possède pas de voiture et la moto est ici un véhicule utilitaire économique. Le réseau routier est dans un état absolument épouvantable : les axes principaux sont évidemment goudronnés, mais farcis de nids de poules et d'ornières et très peu souvent entretenus. Dans les villes et les villages, les rues sont parfois goudronnées, parfois laissées en terre battue, ou recouvertes d'énormes graviers gros comme la moitié du poing. L'absence de système de drainage des eaux pluviales facilite la formation de grandes flaques, et la boue est partout présente en cas de temps humide. Même en voiture, vous devez être très vigilant où vous posez les roues (surtout si le châssis de votre deuche est malade ), parfois ce sont de véritables cratères que vous évitez. Pour le motard, cela provoque deux dangers immédiats : les trous eux-mêmes et les écarts qu'ils suscitent chez les autres usagers de la route. Par ailleurs, il est très fréquent, même sur les plus grands axes, de croiser des animaux : vaches, poules, oies, chiens.

Le motard local adapte donc sa vitesse à ces divers paramètres, et très naturellement, adopte une allure que d'aucun qualifieraient hâtivement d'allure de lopette. Il est à noter la parfaite adaptation du parc motocycliste à cette faible vitesse. En effet, très peu de motos parviennent à dépasser les 90 km/h, de toutes façons, il serait parfaitement déraisonnable d'aller au-delà. Dans la région où nous sommes, les routes sont toutes tracées à la règle, les virages sont rares, mais de toutes façons, prendre de l'angle vu l'adhérence précaire n'est guère conseillé.

En ce qui concerne le port du casque, il est assez rare, et n'imaginez personne porter de blousons ou de pantalon spéciaux, ils sont soit introuvables, soit bien trop chers, et de toutes façons, ils n'intéresseraient personne. Par ailleurs, on rencontre souvent des motos dépourvues de plaque minéralogiques, ce qui ne semble gêner personne.

 

Les motos les plus fréquemment rencontrées sont les IJ. Ce sont de rustiques deux-temps, comparables aux MZ. Elles existent en deux modèles de 350 cm3 de cylindrée : monocylindre ou bicylindres. Les dénominations "Jupiter" et "Planeta" désignent mono et bi sans que j'y ai trouvé une quelconque logique, peut-être que quelqu'un peut m'apporter ls précisions nécessaires. Elles sont très souvent attelées, à des sides de modèle "Spoutnik", qui ressemblent à des Velorex.

 

 

On trouve également beaucoup d'Oural, et leur variante locale, les Dnepr, qui sont d'ailleurs fabriquées en Ukraine ( Le Dnepr est le fleuve le plus important du pays ). Rappelons qu'elles sont propulsées par un bicylindre à plat culbuté, copie imparfaite d'un flat BM. Elles sont également très souvent attelées, mais je n'ai malheureusement pas encore eu l'occasion d'en conduire. J'aimerais beaucoup en ramener une malgré les difficultés administratives évidentes pour l'immatriculation, mais je devrais attendre qu'on me déniche l'occasion idéale, que je viendrai sans doute chercher avec une remorque. Les sides sont les copies conformes de ceux qui équipaient les BMW type Russie. Du côté des petites cylindrées, on ne trouve que des Minsk 125 cm3, deux-temps, admission par la jupe du piston. J'ai pu voir quelques Jawa bicylindre 350 cm3, mais aucune CZ jusqu'alors.

 

J'ai la chance de loger chez une cousine dont le mari, Bohdan, est passionné de moto, il possède deux IJ Jupiter de millésimes différents, l'une attelée et l'autre solo. J'ai pu longuement détailler le moteur lors d'une séance de mécanique. C'est un mono longue course, admission par la jupe du piston, ce dernier étant doté de trois segments. Les transferts ne viennent pas complètement de fonderie, ils sont fermés par des plaques de tôles vissés sur les côtés du cylindre. Il existe deux alésages dans la culasse pour les bougies, sans doute pour pouvoir passer d'une bougie froide à une bougie chaude. Le plan de joint principal est vertical et la boîte de vitesse est très accessible via un carter latéral. La transmission primaire s'effectue par une chaîne duplex. Le carburateur est un modèle soviétique à boisseau plat ( une simple tôle pliée en U ).

Comme sur les MZ, la chaîne secondaire est enfermée dans un carter étanche. La partie cycle est de facture très classique, fourche télescopique dotée d'un frein de direction à friction, bras oscillant et double amortisseur à l'arrière. Les freins sont évidemment des tambours, à l'avant comme à l'arrière. La machine la plus récente dispose d'un double-came à l'avant, parfaitement inefficace, ce qui ne gène pas Bohdan outre mesure, car il ne s'en sert guère. Les machines sont relativement bien finies mais elles souffrent d'une utilisation sans ménagements et d'un entretien réduit au minimum.

J'ai pu essayer plusieurs fois la Jupiter solo, et si la partie cycle était usée par les trous et les bosses, seule une route occidentale permettrai de s'en apercevoir vraiment. Cette moto est relativement nerveuse, mais c'est surtout le couple apporté par la course longue du piston qui est appréciable. Le débattement des suspensions est important, ce qui est obligatoire ( beaucoup de voitures sont ici rehaussées ). Je fut également passager du panier de l'autre moto, dans des conditions assez amusantes : nous devions livrer une machine à laver à la mère de Bohdan. Bohdan conduisait, sa femme était derrière lui, et j'étais dans le panier avec la machine à laver. Dans ces conditions, la vitesse maximale de notre équipage s'établit aux environs de 50 km/h. C'est assez impressionnant d'être doublé par un trente-huit tonnes lancé à fond alors que vous roulez à cette vitesse. Il faut avouer que la segmentation défaillante de l'engin ne facilite pas les choses. Bohdan adopte une conduite "à la chinoise", c'est à dire qu'il coupe le moteur dès que la déclivité naturelle de la route le permet, afin d'économiser l'essence.

A la suite de ce trajet, Bohdan décide de rénover son attelage, à cause de son manque de performance, et du manque de fiabilité du système électrique. Il a l'intention d'adapter un alternateur en 12V, et de changer la caisse du side, car elle est en piteux état. C'est ainsi qu'il échange un chiot de son boxer contre une caisse en meilleur état ( à droite ). Je me charge de séparer l'ancienne caisse du chassis (à gauche ), pour la remplacer par la nouvelle. La principale difficulté est de se procurer 8 ensembles vis-écrou-rondelles d'une dimension acceptable pour effectuer la fixation et Jénia (ici en débardeur) nous est d'un grand secours.

La suite ...

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